Compléments alimentaires à base de bêta-carotène et cancer

Compléments alimentaires à base de bêta-carotène et risque de cancer, les principales données

Définitions

D'après la directive européenne 2002/46/CE, les compléments alimentaires sont « les denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d'autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés… ». Ils sont commercialisés sous diverses formes : gélules, comprimés, ampoules…

      

Le bêta-carotène est un pigment de la famille des caroténoïdes, précurseur de la vitamine A, qui est transformé en rétinol dans l’organisme, présent naturellement dans de nombreux aliments, notamment les légumes (carottes, épinards potirons…) et les fruits (abricots, mangues, melons…).

     

En France, en 2009 l’Afssa a estimé la limite d’apport quotidienne en bêta-carotène par les compléments alimentaires à 7 mg/jour [1]. On retrouve du bêta-carotène dans divers compléments alimentaires soi-disant destinés à « préparer la peau au bronzage » ou à « prévenir les effets du vieillissement ».

Fact nut - CA

Lien entre compléments alimentaires à base de bêta-carotène et cancer

Niveau de preuve scientifique

Plusieurs rapports d’expertise scientifique français et internationaux, ont établi un lien entre la consommation à forte dose de compléments alimentaires à base de bêta-carotène et le risque de cancer.

Actuellement, on ne dispose pas de données pour la population française concernant la part de cancers attribuable à la consommation de compléments alimentaires à base de bêta-carotène.

Dès 1997, le World Cancer Research Fund (WCRF) et l’American Institute for Cancer Research (AICR) ont évalué les niveaux de preuve des associations entre consommation de compléments alimentaires à base de bêta-carotène et risque de cancer. Le dernier rapport, publié en 2018, conclut que la consommation de compléments alimentaires à base de bêta-carotène à fortes doses (>20 mg/jour) chez les fumeurs et les ex-fumeurs est associée à une augmentation du risque de cancer des poumons avec un niveau de preuve convaincant [2]. Ce niveau de preuve est concordant avec la conclusion de l’expertise collective coordonnée par l’Institut National du Cancer (INCa) en 2015 [3].

Localisation de cancers - Consommation de compléments alimentaires bêta carotène France 2020

Focus sur les mécanismes

À forte dose (>20 mg/jour*), et en cas d’exposition à la fumée de tabac, le bêta-carotène, peut exercer un effet co-cancérogène impliquant divers mécanismes, notamment : 

  • une activation des pro-cancérogènes du tabac en molécules cancérogènes,
  • un effet pro-oxydant avec la production de radicaux libres pouvant altérer l’ADN [3].

*En France, chez les adultes de 18 à 79 ans, l’apport moyen journalier de bêta-carotène via l’alimentation (fruits, légumes…) est de 2,69 mg [4]. En sachant que la teneur maximale recommandée en bêta-carotène dans les compléments alimentaires est de 7mg/jour, la prise simultanée de plusieurs compléments alimentaires contenant du bêtacarotène, ou le non-respect de la posologie, pourrait ainsi aboutir à des apports élevés [5].

Recommandation

En 2017, le Haut Conseil de la Santé publique a conseillé d’éviter la prise de compléments alimentaires en dehors de prescriptions médicales.

L’INCa rappelle que la consommation de compléments alimentaires peut, dans certains cas, exposer le consommateur à des risques sanitaires (vis-à-vis du cancer ou d’autres pathologies). Ainsi, sauf cas particuliers et sous contrôle médical, elle n’est pas recommandée. Un régime alimentaire équilibrée est généralement suffisant pour couvrir les besoins nutritionnels [6].

Pour prévenir les risques de cancer, l’INCa conseille de :

  • équilibrer et diversifier son alimentation sans recourir à des compléments alimentaires

En 2019, Santé publique France a publié les nouvelles recommandations nutritionnelles destinées à la population adulte française [7]. Elles ont pour objectif d’aider les adultes à faire de meilleurs choix alimentaires et à adopter un mode de vie plus actif.

Pour s’informer et trouver des outils

Plusieurs outils déployés par Santé publique France sont disponibles, facilitant la mise en pratique des recommandations nutritionnelles :

  • le site mangerbouger.fr, avec notamment « La fabrique à menus », propose des idées de menus de saison variés pour manger équilibré toute la semaine en accord avec les repères nutritionnels.
  • Le Nutri-Score, logo à 5 couleurs apposé sur la face avant des emballages, informe les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des produits. De « A » pour les produits les plus favorables sur le plan nutritionnel à « E » pour les produits les moins favorables.

Consommation de compléments alimentaires à base de bêta-carotène en France

D’après l’enquête représentative de la population française INCA3 de 2017, 29 % des adultes français ont consommé au moins un complément alimentaire au cours de l’année précédant l’enquête. Le taux de consommateurs a progressé de 50 % depuis 2006-2007. Chez les adultes de 18 à 44 ans, la fréquence de consommation est de 32 % [4]. Les femmes sont presque deux fois plus nombreuses que les hommes à consommer des compléments alimentaires. La consommation augmente avec le niveau d’étude et ce plus nettement chez les femmes.

Pour les compléments alimentaires à base de bêta-carotène, les données de consommation sont limitées. Seule une étude publiée en 2013 sur près de 80 000 adultes français participant à la cohorte NutriNet-Santé (75 % de femmes) rapporte que 1,7 % consommaient des compléments alimentaires à base de bêta-carotène. Cette proportion n’était pas plus faible chez les fumeurs (par rapport aux non-fumeurs ou ex-fumeurs) [8].

Références

[1] Afssa. 2009. "Avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments relatif à l’évaluation des teneurs en vitamines et minéraux des denrées enrichies et des compléments alimentaires : synthèse." Maisons-Alfort, Fr: Afssa, 38 p. Disponible sur <www.anses.fr> (consulté le 10.12.2020)

[2] World Cancer Research Fund / American Institute for Cancer Research. Food, Nutrition, Physical Activity, and the Prevention of Cancer: a Global Perspective. Washington DC: AICR, 2018. Disponible sur : <www.wcrf.org> (consulté le 10.12.2020)

[3] Institut National du Cancer. Nutrition et prévention primaire des cancers : actualisation des données. Boulogne-Billancourt : INCa ; 2015. Voir le rapport

[4] Anses. Étude individuelle nationale des consommations alimentaires 3 (INCA 3). Avis de l’Anses. Rapport d’expertise collective. Disponible sur <www.anses.fr> (consulté le 10.12.2020)

[5] DG CCRF. Nutriments : Recommandations sanitaires. Janvier 2019. Disponible sur <www.economie.gouv.fr> (consulté le 10.12.2020)

[6] Institut National du Cancer. Dossier web « Aliments ». Disponible sur : <e-cancer.fr> (consulté le 10.12.2020)

[7] Santé publique France. Recommandations relatives à l'alimentation, à l'activité physique et à la sédentarité pour les adultes. Saint-Maurice : Santé publique France, 2019. 62 p. Disponible sur <www.santepubliquefrance.fr> (consulté le 10.12.2020)

[8] Pouchieu C, Andreeva VA, Peneau S, Kesse-Guyot E, Lassale C, Hercberg S, et al. Sociodemographic, lifestyle and dietary correlates of dietary supplement use in a large sample of French adults: results from the NutriNet-Sante cohort study. Br J Nutr. 2013 Oct;110(8):1480-91. (consulté le 10.12.2020)